Art dans l’espace public. Les artistes accompagnent la transformation de la ville

L’artiste londonien Peter Logan fait des repérages sur la pointe de Villès pour reconstruire son œuvre Les Javelots endommagée en 2019. Il est accompagné par l’adjoint à la culture Michel Ray. (©Ville de Saint-Nazaire – Christian Robert)

Depuis longtemps, la Ville de Saint-Nazaire fait appel aux artistes pour que leurs œuvres accompagnent l’évolution du paysage urbain. Cette volonté est réaffirmée aujourd’hui. De nouvelles œuvres s’intègrent dans l’espace public, d’autres font l’objet de rénovations.

 

Du 27 février au 1er mars, la Ville de Saint-Nazaire recevait l’artiste londonien Peter Logan, dont l’œuvre Les Javelots avait dû être démontée en juillet 2019 à la suite des dégâts provoqués par la tempête Miguel. « J’ai pleuré, confie l’artiste près de l’emplacement de sa sculpture à la pointe de Villès, boulevard Albert-Ier. Mes œuvres sont comme mes enfants. »

 

Rénovation des Javelots de Saint-Nazaire

Alors que souffle un vent glacial, Peter Logan échange avec les urbanistes de l’agence Phytolab. Il s’agit d’intégrer l’œuvre rénovée sur un front de mer qui sera l’objet d’un réaménagement à partir de mi-2024 (4e phase d’aménagement du front de mer). Les Javelots devraient quant à eux être réinstallés à l’été 2023, si les futurs travaux le permettent.

« C’est la partie la plus basse de l’œuvre, au niveau du socle, du sextant, qui a cédé aux vents, explique Peter Logan. L’aluminium qui la compose sera remplacé par de l’inox, métal dont la structure moléculaire a une durée de vie infinie. » Conçue dans le même esprit avec un cabinet d’ingénieurs – la sculpture de 1992 rendait hommage à la navigation et à l’industrie-, l’œuvre pourra résister aux contraintes environnementales.

De retour à Saint-Nazaire après une quinzaine d’années, l’artiste se dit reconnaissant de pouvoir reconstruire son œuvre. « Elle m’avait été inspirée par une visite à Saint-Nazaire, à l’invitation de Joël Batteux. C’était un honneur et une opportunité unique au monde de pouvoir la réaliser entre la Loire et l’océan Atlantique. »

Selon l’adjoint à la culture Michel Ray, le retour des Javelots est très attendu par le public. « Eminemment populaire et emblématique, l’œuvre était écrite pour ce lieu », souligne-t-il. Plus résistante, la sculpture ne devra plus être démontée chaque hiver comme c’était le cas depuis dix ans.

Les Javelots forment un immense mobile, plus de 14m de haut, composé d’un sextant, d’un fuselage et de javelots, en mouvement selon les vents. Cette œuvre de 1992 avait été démontée en 2019 après la tempête Miguel. (©Ville de Saint-Nazaire - Christian Robert)

Une œuvre entre l’école des Beaux-Arts et le théâtre

A quelques kilomètres de Villès-Martin, le vent s’engouffre dans la nef au niveau du parvis entre le théâtre Simone-Veil et l’école des Beaux-Arts. Ici aussi les éléments et les savoir-faire humains ont inspiré l’artiste Séverine Hubard, sélectionnée parmi cinquante candidats pour le 1% artistique (voir encadré) du projet architectural de l’école. La réhabilitation et l’extension de l’ancienne gare en école permettent en effet le financement d’une œuvre pour un montant de 85 000 €.

« J’ai choisi de proposer un parcours en trois parties, dans lequel on peut imaginer le parcours d’un étudiant des Beaux-Arts », explique Séverine Hubard. Mi-septembre surgira au sein de la nef, côté mer, une île composée de vingt-un blocs de pierres brutes provenant de la carrière de Rouans. Cette île ou Land sera surmontée d’un mât de douze mètres en haut duquel flottera un drapeau dessiné par un étudiant de première année à l’issue d’un concours. « Ce concours Hissez haut sera renouvelé chaque année, ajoute l’artiste, et les drapeaux seront conservés, écrivant ainsi une histoire. »

Un interstice appelé Sketch (croquis en français) sera formé de pierres taillées, comme des formes géométriques en construction. La sculpture, qui pourra servir de mobilier urbain pour se reposer, symbolise le temps des études, un cours de dessin de perspectives.

La troisième partie ressemblera à un radeau ou raft. Vingt-une pierres taillées dans des formes géométriques abouties et imbriquées figureront les rondins ou le safran de l’embarcation surmontée d’une voile métallique blanche, à la fois une ode au bricolage et une invitation à l’aventure.

La directrice des Beaux-Arts à Saint-Nazaire, Leïla Zerrouki, apprécie l’intervention de l’artiste qui a à cœur d’impliquer les étudiants : « Le travail de Séverine Hubard participe à la perspective du diplôme national d’art (DNA) mention territoire, paysage, espace public. » La maquette de l’œuvre Land-Sketch-Raft a d’ailleurs été réalisée par une quinzaine d’étudiants lors d’un atelier de travail de trois jours avec l’artiste, en partenariat avec Le Grand Café.

Séverine Hubard présente son projet Land-Sketch-Raft qui verra le jour en septembre sur le parvis de la nef. "Je me suis inspirée de mon parcours d’étudiante en art. Originaire de Lille, j’avais passé deux ans aux Beaux-Arts de Nantes, c’est comme un retour après des voyages." (©Ville de Saint-Nazaire - Christian Robert) Pendant trois jours, Séverine Hubard est présente à l’école des Beaux-Arts pour un atelier avec quinze élèves. Julie Cavé, au centre, s’est concentrée sur un jeu graphique avec la matière et les formes : "Cela permet une autre approche. En plus de s’intéresser à la sculpture et de découvrir le plâtre dans ses divers aspects, l’échange est très enrichissant." (©Ville de Saint-Nazaire - Christian Robert)

Michel Ray, adjoint à la culture

« L’œuvre d’art raconte un territoire, elle raconte Saint-Nazaire. Telle est la fonction de l’art dans l’espace public. Nous travaillons à prolonger cette intention avec son inscription dans le projet stratégique de mandat, mais aussi d’autres dispositifs comme le 1% artistique. C’est l’art accessible à tous les publics et cela nous tient à cœur.
L’artiste développe en effet un propos sensible, quelque chose de fort. Saint-Nazaire est en perpétuelle évolution et le front de mer continue sa mue. L’œuvre doit s’y adapter tout en la révélant, en rendant agréable le cadre de vie. »

Le 1% artistique

Le 1 % artistique consiste à financer la réalisation d’une œuvre d’art avec 1% des sommes consacrées à la construction ou la réhabilitation d’un bâtiment public. L’œuvre doit s’intégrer dans le projet architectural de ce bâtiment. Instauré en 1951 dans le contexte de la Reconstruction, le dispositif permet aujourd’hui de soutenir la création contemporaine.

À Saint-Nazaire, une œuvre pour le nouveau conservatoire de musique et de danse est ainsi en cours de commande. Quant au futur pôle d’équipements Brossolette, l’œuvre d’Olive Martin et de Patrick Bernier, Bandes Apotropaïques, est en cours de réalisation.

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