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Expo. Le Grand Café et le LiFE redéfinissent les frontières

C'est une expo qui repousse les frontières et transgresse quelques idées reçues. Son nom : L'asymétrie des cartes. Ou comment huit artistes nous livrent leur vision engagée.
Comment parler de frontières sans tomber dans certains clichés véhiculés par les médias ? Si le sujet est plus que jamais périlleux, c'est avec brio que les artistes exposés auGrand Café et auLiFE relèvent le défi. « Le visiteur est invité ici à prendre vis-à-vis de la notion de frontière une distance poétique, politique parfois, mais jamais misérabiliste », explique Sophie Legrandjacques, directrice du Grand Café et commissaire de l'exposition.
Des ?uvres puissantes
C'est la première fois qu'une exposition se décline sur les deux lieux nazairiens. Le Grand Café évoque les «frontières invisibles», le LiFE «redessine les territoires». Photos, témoignages, cartographies, installations, courts-métrages... Les procédés sont variés mais la finalité est la même pour ces « artistes-explorateurs », bi-nationaux pour la plupart : pointer du doigt la recomposition permanente des frontières comme paradoxe d'un monde globalisé.
Au Grand Café, Lawrence Abu Hamdan nous parle de langage via une étonnante installation symbolisant le procédé arbitraire par lequel des autorités d'immigration valide, ou non, la provenance des demandeurs d'asile.
Les cartes détournées d'Alexander Apostol soulignent à quel point la cartographie influence l'identité d'un pays. La modélisation symbolique de Milena Bonilla nous questionne sur la valeur des territoires. Et la double projection de Mark Boulos nous déstabilise, coincés entre l'implacable loi du marché pétrolier et les revendications désespérées de pêcheurs nigériens.
Des échos et des empreintes
Au LiFE, au travers des ?uvres de Bouchra Khalili, d'Enrique Ramirez et de Till Roeskens, on est happé par les récits de personnes prisonnières de frontières absurdes, migrants, réfugiés en transit... Bouleversant de sobriété.
Présent à la fois au Grand Café et au LiFE, l'artiste colombien Marcos Avila Forero nous dévoile deux visions de son art engagé : son immersion dans la zone démilitarisée séparant la Corée du Nord de la Corée du Sud raconte autant la Guerre Froide que la guerre civile colombienne ; son bateau de plâtre, tiré à mains nues, nous emmène au Maroc dans son sillage.
« Avec cette sculpture disparaissant en une traînée blanche au fur et à mesure des kilomètres parcourus, j'ai voulu, paradoxalement, laisser une empreinte visible du vécu des migrants invisibles. Et tracer une frontière qui, pour une fois, ne divise pas mais relie », raconte l'artiste, invité cette année en résidence au Grand Café.