Christian Chourot continue à enseigner la flûte traversière à distance. (©Ville de Saint-Nazaire – Christian Robert)
Depuis le reconfinement, les enseignements de musique en dehors du temps scolaire et du 3e cycle ne sont pas autorisés. Au conservatoire, toute l’équipe est mobilisée pour s’adapter à distance et garder le lien avec les élèves.
« Chaque semaine, j’ai cours avec chacun de mes vingt-sept élèves », relate Christian Chourot, professeur de flûte traversière. Pour la plupart, les horaires des cours restent inchangés, mais les échanges entre les enseignants et leurs élèves se font désormais à distance.
« C’est assez étonnant car, via les outils numériques, nous arrivons dans l’intimité des familles », remarque le professeur de flûte traversière. « Parfois, l’ordinateur est dans une pièce commune, parfois dans la chambre, il y a tous les cas de figure. »
Des enseignants investis en ligne…
Comme Christian Chourot, la professeure de violoncelle Cécile Grizard organise tous ses cours hors temps scolaire de chez elle, en visioconférence. « Je m’inquiétais beaucoup car ce confinement intervient en début d’année scolaire, mais on parvient à faire cours à distance même avec les débutants. J’ai trois débutantes de sept ans qui sont très dégourdies », reconnaît l’enseignante.
Il faut cependant s’adapter aux équipements numériques dont chacun dispose et aux aléas techniques. Cécile Grizard a effectué un cours par téléphone à cause d’une mauvaise connexion. Christian Chourot teste différentes applications pour avoir le moins de distorsion de son possible. Mais tous les deux affirment que « le plus important, c’est de garder le lien ».
Quelle que soit leur discipline, instrument, formation musicale ou danse, nombreux ont recours aux enregistrements audio et vidéo comme support pédagogique. « En direct, il y a des décalages qui faussent la pulsation et on ne peut pas tout montrer ».
… avec le soutien des familles
L’équipe du conservatoire compte beaucoup sur les parents et leur présence pendant les cours. « Ils nous aident à corriger la position de l’élève et à le guider pour accorder l’instrument », expliquent Christian Chourot et Cécile Grizard. « Tout doit passer par la parole, un autre lien se tisse avec les familles ».
C’est d’ailleurs l’un des points positifs de cette configuration : l’implication et la reconnaissance des parents. Elles sont d’autant plus importantes que les enseignants passent deux fois plus de temps à préparer leurs supports et à les partager en ligne, par messagerie ou sur des plateformes comme des padlets ludiques et interactifs.
D’autres modalités pour les cours collectifs
Pour les neufs enseignants de formation musicale, les six enseignants de danse et leurs quatre accompagnateurs en musique, les cours collectifs en visioconférence sont bien trop complexes à mettre en place : chant, lecture, chorégraphies à plusieurs rencontrent trop d’obstacles en ligne.
« Il y a aussi la difficulté de faire des mouvements devant une caméra, dans son salon à côté des frères et sœurs », note Alice Duchesne, professeure de danse, « et tout simplement la question de l’espace. »
A la place, des exercices et des contenus sont envoyés aux élèves. Ils favorisent leur autonomie. « On les invite à travailler sur des thèmes, comme le projet Rosas Danst Rosas, une chorégraphie sur une chaise, en préparation d’une présentation le 5 juin. »
Surmonter les difficultés
Les cinquante enseignants voient la cohésion de l’équipe renforcée en cette période si particulière qu’ils jugent riche, mais espèrent transitoire. « On réinterroge nos pratiques, on cherche de la matière, on crée d’autres façons de faire même s’il nous manque beaucoup de réponses sur ce que deviennent nos données par exemple », conclut Alice Duchesne.
Jeanne Gallois, professeure de formation musicale, fait partie d’un groupe de travail sur les pratiques d’enseignement à distance : « on recense nos outils, nos supports numériques et on partage des informations sur la pédagogie artistique à distance. On s’interroge aussi sur ce que cela génère dans notre métier et pour nos élèves. Certains d’entre nous sont en difficulté selon leur niveau d’équipement personnel et de formation aux pratiques numériques. »
Le conservatoire s’est équipé de trois ordinateurs avec caméra. Si les enseignants de musique parviennent à organiser des auditions virtuelles, ils ressentent les limites du numérique : « il nous manque le principal qui est le partage, l’émotion du cours et jouer ensemble ».
Dans les classes à horaires aménagés
Les Classes à Horaires Aménagés en Musique ou Danse, CHAM et CHAD, et les élèves de 3e cycle poursuivent leur année scolaire en présentiel, dans le respect du protocole sanitaire. « Les régisseurs ont fabriqué des sortes d’écrans en plastique transparent », explique le professeur de flûte traversière Christian Chourot. « Cela nous permet d’enlever le masque pour jouer des instruments à vent. »
A part dans le cas particulier des instruments à vent, le port du masque est respecté, tout comme l’ensemble des mesures barrières : désinfection des supports, aération des salles, distanciation physique… « Tout est scrupuleusement organisé », confirme la professeure de violoncelle Cécile Grizard qui ne donne plus que 3h de cours hebdomadaires en présentiel au lieu de 16 en temps normal. « Même si on respire beaucoup pour jouer, pour les instruments à cordes on garde le masque, on se tient à distance et on évite de toucher l’instrument. »
La bibliothèque du conservatoire reste ouverte du lundi au jeudi. « C’est un peu vide et un peu triste », remarque Florence Madre, « mais cela permet de garder le lien avec les professeurs et les élèves de CHAM, de CHAD et de 3e cycle. Les gens sont heureux de venir au travail. » Le fond, constitué à 80% de partitions, représente une ressource importante pour les enseignants qui ont besoin d’avoir des exemplaires en plus pour faire progresser les élèves qui ont cours à distance.