Dans les collèges de Saint-Nazaire, des dispositifs sont mis en place pour favoriser l’accueil et l’intégration des élèves allophones, les enfants qui ont une langue étrangère pour langue maternelle.
Comme chaque matin, ce 12 novembre, Delphine Toutin accueille sa classe avec une série de questions, un échange autour du jour férié de la veille et des activités du week-end. L’enseignante d’UPE2A NSA (voir lexique ci-dessous) au collège Anita-Conti rappelle ainsi ce que marque le 11 novembre, s’intéresse à chacun de ses onze élèves et convoque le vocabulaire du quotidien.
« Qu’as-tu fait, Aïcha ? » « J’ai vu un film au cinéma » D’autres répondent qu’ils ont joué au football ou cuisiné du maffé, plat africain à base d’arachides. La plupart de ces jeunes ont environ 15 ans et sont récemment arrivés de Guinée, du Mali ou de la Côte d’Ivoire, seuls, en ayant peu ou pas du tout fréquenté l’école. Nombre d’entre eux vivent en foyer, à plusieurs kilomètres de Saint-Nazaire.
Lexique
- Élève allophone : jeune de moins de 18 ans arrivé en France depuis peu et parlant une, voire d’autres langues que le français. Certains parlent le français, d’autres pas. Certains sont allés à l’école, d’autres jamais ou peu.
- FLS : français langue seconde
- UPE2A : unité pédagogique pour élèves allophones arrivants. Il en existe deux à Saint-Nazaire (collèges Jean-Moulin et Pierre-Norange).
- UPE2A NSA : unité pédagogique pour élèves allophones arrivants non ou peu scolarisés antérieurement. Il en existe trois en Loire-Atlantique, soit environ 45 places (une à Saint-Nazaire et deux à Nantes).
- OEPRE : ouvrir l’école aux parents pour la réussite des enfants
Devenir écolier en France
« Je ne connais pas leurs parcours, à moins qu’ils souhaitent m’en parler », explique Delphine Toutin. Il est à peine 9h, mais elle regorge d’énergie et de sourire. « Il faut être dynamique, souple et surtout à leur écoute », souligne-t-elle.
Delphine Toutin est professeure des écoles détachée au collège pour la 2e année scolaire. Toute la journée, elle apprend aux jeunes le « métier d’élève » et leur enseigne le français (la lecture), les mathématiques, l’anglais et l’histoire-géographie. « On aborde la laïcité, les grandes villes ou même le corps humain. Je m’adapte à leurs demandes, tout en ayant pour objectif que le français devienne leur langue seconde, langue de leur vie à l’école. »
Intéressée depuis toujours par les langues, Delphine Toutin a passé un master de FLS (français langue seconde), ce qui lui a permis de postuler sur ce poste spécifique de l’Éducation nationale. Les jeunes passeront une année dans sa classe avant de rejoindre une UPE2A. Dans ces unités, les élèves se voient enseigner le français six ou neuf heures par semaine pendant une à deux années, tout en étant intégrés dans une classe ordinaire. Ils bénéficieront ensuite de quelques heures de FLS en fonction de leur niveau.
Au collège Pierre-Norange, Anthony Heuzé fait cours à une vingtaine d’élèves parmi lesquels certains viennent d’Anita-Conti. Dans le groupe, les niveaux sont très divers. Ce jeudi, l’enseignant accueille d’ailleurs deux Brésiliens. D’autres enfants sont là depuis 2023.
« Arina n’a plus qu’une heure avec nous au lieu de neuf l’an dernier car elle a beaucoup progressé, se réjouit Anthony Heuzé. J’étais professeur dans le primaire, mais j’adore voyager et j’avais envie d’enseigner à des enfants étrangers, de m’adapter à leurs besoins et de les valoriser. » Sortie au Sénat avec le soutien de la Ville, réalisation de vidéos ou de slams… Tous ces projets permettent de travailler les langues et de donner confiance en chacun.
Pour les chefs d’établissement des deux collèges, Stéphane Parès et Sébastien Mandoux, l’enjeu est le même : faire de ces parcours difficiles une force. Le maire de Saint-Nazaire, David Samzun, les reçoit deux fois par an pour échanger sur ces problématiques.
L’école aux parents
Le dispositif OEPRE ou école aux parents, porté par l’Éducation nationale et le ministère de l’Intérieur, permet aux mères et aux pères de suivre des cours de français au sein des collèges. Leur enseignante FLS Nathalie Bély apprécie la bonne humeur du groupe.
« On se donne mutuellement le sourire, ça fait du bien. Je peux les aider à ma petite mesure et leur permettre de mieux se débrouiller dans leur quotidien. » Des sorties à la médiathèque ou à Saint-Nazaire sont organisées régulièrement. « L’ouverture culturelle des parents favorise celle des enfants. »